En tant qu'architecte, pourquoi vous être tourné vers le feng-shui ?
Lorsque j’ai rencontré le feng-shui, il y a 25 ans, ce fut un coup de foudre. Le feng shui m’est apparu comme une possibilité d’intégrer une dimension plus sensible, plus subtile et plus qualitative à mon travail d’architecte. Prendre en compte le point de vue de l’énergie – même si, au début, c’était évidemment un peu flou – me semblait une façon de mettre de la vie dans mes projets et dans mes réalisations et aussi – chose très importante – de mettre en avant l’être humain.
Pour y arriver, je me suis rendu compte, assez vite, qu’il me fallait actualiser le feng shui à notre monde moderne et également l’adapter à notre mode de vie occidental : cela m’a amené à créer les concepts de feng shui à l’occidentale et de maison-miroir. Le principe de la maison-miroir m’a permis de découvrir le « miroir » que la maison renvoie à ses habitants afin de les aider à se (re)connaître ; c’est quelque chose qui m’a beaucoup enthousiasmé et qui m’est très spécifique, car cela correspond à une quête de connaissance de soi et à une volonté de me transformer intérieurement.
Je dis parfois que le feng shui et la géométrie sacrée – que je développe également – permettent de relier le Ciel et la Terre ! C’est une possibilité de se relier à une dimension plus grande, une dimension spirituelle. C’est aussi cela qui participe à donner la première place à l’être humain qui a un rôle d’intermédiaire à jouer entre le Ciel et la Terre.
En quoi consiste votre intervention d'expert en feng-shui ?
Mon intervention ne vise pas seulement la décoration à laquelle le feng shui est souvent associé de façon réductrice. J’interviens tout au long du processus de la construction : choix du terrain, études (volume, implantation, orientation...), chantier de construction, aménagement intérieur. À chaque étape, le feng shui apporte un éclairage original.
Dans le cas d’une construction existante, la première chose que je propose à mes clients, c'est de réaliser un état des lieux énergétique de leur logement : cela leur donne une idée de l’énergie de la maison et des changements éventuels à réaliser. Ce diagnostic très complet vise à déterminer si l’énergie est plutôt rapide ou plutôt lente ; il comporte l’étude des éléments suivants :
- l’environnement, le volume de la construction, les accès ; si, par exemple, la maison est située sur un terrain environné de montagnes, l’énergie sera plus rapide que si elle se trouve en plaine.
- l’organisation intérieure : j’observe la forme des différents espaces, les circulations, l’emplacement des cloisons séparatives et des portes ; si, par exemple, les pièces sont réparties de part et d’autre d’un long couloir rectiligne, l’énergie sera rapide.
- l’aménagement et la décoration : si, par exemple, il y a accumulation de meubles et d’objets, l’énergie sera ralentie.
Une fois ce diagnostic énergétique réalisé, on peut voir quels sont les éventuels changements à effectuer pour équilibrer l’énergie : l’apaiser si elle trop rapide, la dynamiser si elle est trop lente. Une façon assez simple d’équilibrer l’énergie est d’utiliser des couleurs : chaudes si l'énergie est trop lente (jaune, orange, rouge), froides si elle est trop rapide (bleu, indigo, violet).
Si mes clients envisagent des transformations, l’état des lieux va montrer si celles-ci amélioreront vraiment l’énergie existante ; sinon, il faudra y renoncer et envisager autre chose. Par exemple, inutile d’abattre des cloisons pour créer un grand espace dynamisant l’énergie si celle-ci est déjà très rapide.
Pour la construction d'une maison neuve, je propose également de faire un état des lieux énergétique du lieu de vie actuel bientôt quitté. Ce diagnostic va montrer des aspects positifs qui parfois ne sont qu’à l’état de germes et qui vont constituer des pistes pour orienter le futur projet. Parallèlement, on voit les aspects négatifs que les clients pourraient avoir tendance à reproduire dans leur futur projet, comme une énergie trop rapide dans les chambres, signe d’un manque d’intimité.
Dans tous les cas, je réalise évidemment les missions « classiques » d’un architecte : avant-projet, permis de construire, suivi du chantier ; mais ce qui me différencie d’un concepteur « classique », c’est que, tout au long du projet, je m’appuie toujours sur l’énergie : c’est, mon unique référence et ma spécificité. Mon but est de générer dans la construction une circulation harmonieuse de l’énergie qui va permettre, au final, que la construction « ressemble » à ses occupants et qu’elle leur apporte un réel bien-être.
Il n’existe pas de maison idéale : nous sommes tous différents et avons besoin d’un environnement relativement spécifique et unique.
Favorisez-vous l'éco-construction ?
Oui, pour moi, c'est une évidence… d’ailleurs, la première maison que j’ai construite, avant de connaître le feng shui, était une maison en bois ! Je veux défendre une architecture naturelle et je pense que si on veut tirer parti de bénéfices « subtils »liés à l’énergie qu’apporte le feng shui, il serait absurde de ne pas intégrer l’éco-construction et de vivre dans des lieux polluants et toxiques. Je veux aussi respecter la Nature parce que c’est elle qui nous apporte la vie et qu’elle est porteuse de sagesse ; à ce propos, j’ai beaucoup d’admiration pour Frank Lloyd Wright, un architecte américain qui vécut de 1867 à 1959 et qui fut précurseur, notamment, dans sa façon d’harmoniser ses réalisations avec la nature… tout cela avant qu’on ne parle d’écologie.
D’un autre point de vue, la connaissance de l’énergie m’a permis d’affiner certains choix liés à l’éco-construction. Il est possible, en effet, de comprendre beaucoup de choses à travers le principe de l’énergie, comme faire le choix entre une construction en bois et une construction en briques. Le bois a une énergie plus rapide que la brique : donc si le futur habitant est quelqu’un qui n’a pas trop les pieds sur terre (énergie rapide), le bois ne lui conviendra pas ; il vaudra mieux qu’il s’oriente vers une maison en brique qui va l’aider à « s’ancrer » ; inversement, si la personne est relativement « terre-à-terre » (énergie plus lente), une maison en brique risque de l’alourdir davantage. On peut se dire aussi que l’idéal est d’associer les deux matériaux : un premier niveau en brique et le second en bois, ou encore un mur intérieur en brique dans une ossature bois.
Selon vous, à quoi ressemble la maison idéale ?
Dans l’absolu, il n’existe pas de maison idéale : nous sommes tous différents et nous avons tous besoin d’un environnement relativement spécifique et unique. Et même, à notre niveau individuel, il serait illusoire de penser que notre maison est idéale. Ce n’est pas possible : comme notre maison est notre miroir et que nous n’avons pas encore atteint la perfection (!), notre maison ne peut pas être idéale… même pour nous. D’ailleurs, l’état des lieux énergétique le montre : on observe toujours des aspects positifs et des aspects négatifs. Ce négatif peut être vu comme des conditionnements, des limitations, des habitudes qui réduisent, rabaissent les possibilités de notre maison. D’une manière générale, on voit que l’habitat est un domaine de vie très conditionné ; ces conditionnements sont présents un peu partout : magazines de décoration, magasins de meubles, émission de télévision, phénomènes de mode…
Si on veut une maison idéale, il faut commencer par mettre en lumière nos conditionnements. Lorsque nous avons un projet (construire une maison ou acheter un meuble), il est important de se demander « pourquoi veut-on telle ou telle chose ? ». Une fois qu’on a pris conscience de nos conditionnements et qu’on les a écartés, on peut donner la place à nos « besoins profonds » qui vont s’exprimer par une qualité : par exemple, le fait de ressentir une vraie sécurité dans sa maison ou de bien s’y régénérer, ou encore de développer notre créativité ou d’expérimenter de belles relations. Si on fait cela, nul doute qu’on se rapprochera de notre maison idéale, car celle-ci exprimera nos vrais besoins et elle nous ressemblera.
Y a-t-il un surcoût lorsqu'on fait appel à un architecte spécialisé en feng-shui ?
Pour ma part, je ne demande pas de supplément en tant qu’architecte spécialisé en feng shui, car le feng shui fait partie de moi. Je ne pourrais pas imaginer concevoir un projet sans intégrer la dimension énergétique : c’est devenu comme une seconde nature pour moi : donc quand je conçois un projet, en tant qu’architecte, j’intègre forcément le feng shui.
Et puisqu’on parle d’argent, il faut dire que l’approche du feng shui n’entraîne pas de surcoûts pour le client. En effet, le but n’est pas de s’entourer d’objets particuliers, de gadget aux propriétés extraordinaires. Votre maison n’a pas besoin d’être extravagante pour être « feng shui » ! Il suffit que tout ce que vous mettez en place permette à l’énergie de circuler de façon fluide. Les solutions qui vous correspondent en profondeur sont souvent plus simples que ce que vous auriez pu imaginer.
Quand l'architecture devient feng-shui
Rencontre avec Luc Antoine, architecte et conseiller feng-shui
Construire sa maison en respectant les principes du feng-shui est le rêve de tous ceux qui aspirent à l'équilibre et à l'harmonie. Pour les y aider, certains architectes se sont intéressés de près à cette discipline ancestrale. L'un d'eux répond à nos questions.
Temps de lecture : 7 min
Merci Luc d'avoir répondu à nos questions.