On a plus de chiens, mais moins de bébés : y a-t-il un lien ?

Dans la société actuelle, deux tendances semblent s'opposer : une baisse de la natalité d'un côté, une augmentation du nombre de possesseurs de chiens, de l'autre. Doit-on y voir un lien de cause à effet ? Le chien remplace-t-il l'enfant dans les foyers ? Décryptons ce phénomène afin de voir que les choses tendent à être plus nuancées que ce simple constat.

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On a plus de chiens, mais moins de bébés : y a-t-il un lien ?

Les possesseurs de chiens peuvent avoir tendance à chouchouter leur animal de compagnie, comme ils le feraient avec leur enfant. Certains observateurs n'hésitent donc pas à faire le lien entre le fait d'avoir un chien et celui de ne pas souhaiter avoir d'enfant. Mais ce n'est pas si simple. Comme nous allons le détailler, les chiens peuvent répondre à certains besoins actuels et compenser un manque, mais cela ne veut pas forcément dire qu'ils se substitueront aux enfants dans un avenir proche.

La baisse de natalité liée à la possession croissante de chiens ?

En Occident, la baisse de la natalité inquiète les gouvernements, qui redoutent une crise démographique sans précédent face à la volonté assumée de certaines femmes en âge de procréer de ne pas avoir d'enfant. Selon l'institut Ipsos, elles étaient 30 % en 2022 à penser ainsi. Un chiffre alarmant, que certains n'hésitent pas à opposer à une nouvelle statistique, tirée d'un sondage OpinionWay de 2023 : il y aurait 74 millions d'animaux domestiques dans les foyers français, ce qui constitue un record absolu.

Les chiens et les chats ont évidemment une place à part, et certains de leurs propriétaires les traitent comme leurs propres enfants : ils les bordent avant de dormir, leur offrent des cadeaux à Noël, les appellent « mon bébé », et ils les considèrent, pour près de 80 % d'entre eux, comme un élément essentiel de leur vie.

La comparaison entre ces différentes données peut sembler pertinente, quand on sait qu'un mouvement revendiquant ce statut de parents sans enfants, mais avec un chien, cartonne sur les réseaux sociaux. On le présente comme un mode de vie plus souple, moins onéreux, qui permet au(x) propriétaire(s) de l'animal d'avoir une liberté financière accrue par rapport aux couples avec enfants.

Toutefois, cette tendance est à nuancer, comme le suggère Eniko Kubinyi, éthologue au sein de l'Université Eötvös Loránd (Hongrie), dans une étude publiée en mars 2025.

Adopter un chien, pour combler un manque

La scientifique part d'un constat très simple : le nombre de chiens dans les foyers a augmenté au cours des deux dernières années, alors que le nombre d'enfants est resté stable ou a diminué. Elle explique ensuite que des études ont bel et bien démontré un lien entre la possession d'un chien et une vision négative de la parentalité : des mamans avec enfant(s) et chien(s) trouveraient l'éducation d'un petit plus fatigante, et pourraient donc ne plus vouloir procréer, quand la présence d'un chien chez un couple pourrait générer des tensions et ainsi donner une image négative d'une éventuelle parentalité.

Mais pour Eniko Kubinyi, l'affection apportée à nos canidés ne signifie pas pour autant un rejet de l'enfant, ni même du concept de l'enfant dans la famille, mais plutôt une initiative visant à combler un manque. La biologiste affirme que les formes traditionnelles de solidarité et d'entraide ont disparu des sociétés modernes, mais que l'humain a un besoin irrépressible d'interactions sociales – il doit se faire des amis, protéger l'autre, accompagner ses proches, tisser des liens en communauté – et que faute de pouvoir le faire dans la société actuelle, par manque de moyens ou de temps, il reporte ces comportements sur un chien. Cela lui donne l'impression d'être utile et d'être aimé d'un amour aussi inconditionnel que celui d'un bébé.

bisou chien

Elle évoque également le fait qu'on en serait à choisir nos chiens pour leurs similitudes avec les tout-petits : certaines des races de chiens les plus populaires (notamment le carlin ou le bouledogue français) partageraient des traits évoquant les bébés, comme des yeux ronds, un petit corps ou un museau rabougri. D'ailleurs, ne choisit-on pas des prénoms pour chien identiques à ceux qu'on donne à nos enfants ?

Si les possesseurs de chiens augmentent, c'est donc principalement dû à l'évolution de la société qui favorise, hélas, l'isolement social. Le chien ne remplace pas l'enfant, mais il servirait de compensation affective, en devenant un membre à part entière de la famille.

Le chien, un bon préparateur à la parentalité ?

Pour terminer sur une note positive, on apprend via diverses études que le chien pourrait tout de même jouer un rôle social intéressant, voire donner envie à leurs maîtres de concevoir un enfant. Certains verraient l'adoption d'un chien comme une première étape vers la parentalité, grâce à laquelle ils se familiariseraient avec les responsabilités induites par la présence d'un petit être fragile chez soi.

Le chien serait aussi un bon entremetteur, puisque les femmes percevraient les hommes propriétaires de chiens comme de potentiels bons papas. Enfin, ces animaux de compagnie seraient propices aux nouvelles rencontres, lors des sorties dans les parcs et autres jardins. En extrapolant un peu, on peut donc imaginer que les chiens conduisent à la formation de nouveaux couples… susceptibles de faire des enfants !

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